Risques juridiques pour les utilisateurs et traders de crypto en Tunisie en 2025
Mary Rhoton 2 décembre 2025 7

En 2025, la Tunisie reste l’un des pays les plus restrictifs au monde en matière de crypto-monnaies. Si vous possédez, échangez ou minerez des actifs numériques sur le territoire tunisien, vous commettez un crime financier. Ce n’est pas une simple violation administrative. C’est une infraction pénale qui peut vous coûter jusqu’à cinq ans de prison et la saisie de tous vos biens.

La loi interdit tout, sans exception

La Banque Centrale de Tunisie (BCT) a publié en 2018 un décret qui interdit formellement toute activité liée aux crypto-monnaies. Pas de trading. Pas de mining. Pas de paiements. Pas même de garder des bitcoins dans un portefeuille numérique si vous êtes sur le sol tunisien. Toute transaction en crypto est considérée comme une violation du code des changes.

Les banques tunisiennes sont obligées de bloquer automatiquement tout transfert lié à une plateforme crypto. Si vous essayez d’envoyer des dinars vers Binance, Kraken ou un échange offshore, la transaction sera refusée. Votre compte peut même être gelé si la banque détecte un motif suspect - même si vous n’avez pas fait de trading, juste consulté un site web.

Le mining est particulièrement risqué. Importer un ASIC pour miner du Bitcoin est illégal. Les douanes saisissent les équipements à l’arrivée. Si vous êtes pris en train de miner à la maison, vous risquez non seulement la confiscation de votre matériel, mais aussi une enquête pénale. Les autorités ne font pas de distinction entre un particulier et une entreprise : la peine est la même.

Les sanctions : prison, amendes, saisie

Les sanctions ne sont pas un avertissement. Ce sont des punitions réelles. Selon le code des changes tunisien, toute activité en crypto peut entraîner :

  • Une amende pouvant atteindre plusieurs dizaines de milliers de dinars tunisiens
  • Une peine d’emprisonnement de jusqu’à cinq ans
  • La saisie immédiate de tous les bénéfices réalisés, même si vous les avez déjà convertis en dinars
  • La confiscation des équipements utilisés pour le mining ou le trading

Les entreprises ne sont pas épargnées. Un commerçant qui accepte des crypto-monnaies comme paiement peut être poursuivi pour contournement du contrôle des changes. Une société qui tente d’inscrire des bitcoins sur ses comptes comptables commet une fraude fiscale et financière. Les auditeurs sont tenus de signaler tout actif numérique non déclaré.

Qui contrôle tout ça ?

Trois organismes travaillent ensemble pour appliquer cette interdiction :

  • La Banque Centrale de Tunisie (BCT) : elle a lancé l’interdiction en 2018 et gère le « sandbox » réglementaire, un espace fermé où seuls certains projets blockchain expérimentaux sont autorisés - mais toujours hors ligne et sans crypto publique.
  • Le Conseil des Marchés Financiers (CMF) : il surveille les actifs financiers. Même les tokens de sécurité sont interdits, car aucun cadre légal n’a été approuvé pour les émettre.
  • La Commission Nationale de Lutte contre le Blanchiment d’Argent (CTAF) : elle exige que les banques signalent toute activité suspecte. Si vous envoyez de l’argent à l’étranger sans justification claire, vous êtes automatiquement mis sous surveillance.

La BCT a même développé une version nationale de monnaie numérique, l’E-Dinar, mais elle est entièrement contrôlée par l’État. Ce n’est pas une crypto. C’est une monnaie digitale centralisée, utilisable uniquement dans des projets pilotes gouvernementaux. Rien de comparable à Bitcoin ou Ethereum.

Trois agents gouvernementaux détruisent une chaîne de blocs tandis que des développeurs partent en suitcase vers l'étranger.

Les gens continuent quand même - et ça devient dangereux

Malgré la loi, les Tunisiens utilisent toujours les crypto-monnaies. Pourquoi ? Parce que les taux de change sont mauvais, l’inflation grignote les économies, et les jeunes veulent accéder à des opportunités mondiales. Le marché noir a émergé.

Les traders utilisent des VPN pour accéder à des plateformes offshore. Ils échangent des cryptos contre des dinars en personne, dans des cafés ou par transferts bancaires masqués. Certains se servent de WhatsApp ou Telegram pour organiser des ventes. Mais chaque transaction est un risque.

Des cas ont été documentés : des comptes bancaires gelés sans explication, des arrestations après des transferts suspects, des équipements de mining saisis lors d’opérations de douane. Les gens ne savent pas qu’ils sont surveillés - jusqu’au jour où la police frappe à leur porte.

Les entreprises fuient, les talents partent

La Tunisie a longtemps été un pôle technologique en Afrique du Nord. Mais depuis l’interdiction, les startups blockchain ont quitté le pays. Des équipes qui auraient pu créer des solutions locales pour la finance inclusive, la traçabilité agricole ou les micro-paiements, ont déménagé à Dubaï, au Portugal ou en Géorgie.

Les développeurs tunisiens qui travaillent sur la blockchain ne peuvent plus trouver de financement local. Les investisseurs locaux ont peur. Les banques refusent de parler à des entreprises qui parlent de crypto. Résultat : un cerveau en fuite. Une génération de jeunes talents qui ne peuvent pas construire ici, même s’ils veulent.

Deux personnes échangent un USB contre des dinars dans un café, sous une caméra de surveillance rouge.

Les seules exceptions : le « sandbox » et la blockchain privée

La BCT autorise quelques projets dans un cadre fermé. Des entreprises comme VFunder, Hydro E-Blocks ou No Phobos peuvent expérimenter des technologies blockchain - mais uniquement si elles ne traitent pas de crypto-monnaies réelles. Leur infrastructure est hébergée à l’étranger. Leur code est audité. Leur usage est limité à des cas précis : traçabilité des chaînes d’approvisionnement, enregistrement de données publiques, ou suivi de carbone.

La blockchain est acceptée… mais seulement si elle est contrôlée par l’État. Pas de décentralisation. Pas de transparence réelle. Pas de liberté. Juste un outil de gestion centralisée, sans aucune valeur pour les citoyens ordinaires.

Que faire si vous êtes déjà impliqué ?

Si vous avez des crypto-monnaies en portefeuille, ou si vous avez déjà fait des transactions : ne les touchez pas. Ne les vendez pas. Ne les transférez pas. Ne les déclarez pas. Toute action peut déclencher une enquête.

La meilleure stratégie, aujourd’hui, est de ne rien faire. Évitez toute activité crypto tant que la loi ne change pas. Les conseils juridiques locaux sont rares. La plupart des avocats vous diront simplement : « Ne vous impliquez pas. »

Si vous êtes un entrepreneur ou un développeur, concentrez-vous sur des projets qui n’utilisent pas de crypto. La Tunisie accepte la technologie blockchain - mais seulement si elle est sous contrôle étatique. C’est une porte étroite, mais elle existe.

Le futur : changement ou rigidité ?

Certains observateurs pensent que la Tunisie devra évoluer. Les pays voisins comme l’Égypte ou le Maroc commencent à adopter des cadres légaux pour les crypto. Les jeunes générations ne comprennent pas pourquoi elles sont exclues du monde numérique. Les remittances en crypto pourraient réduire les coûts pour les Tunisiens à l’étranger.

Des discussions parlementaires ont commencé sur une possible réclassification des crypto-monnaies comme « actifs virtuels », avec un cadre de régulation basé sur les normes du GAFI. Mais rien n’est encore officiel. Pour l’instant, la position du gouvernement reste inébranlable : pas de crypto, pas de compromis.

En 2025, la Tunisie choisit la sécurité contre l’innovation. Mais cette sécurité coûte cher : des opportunités perdues, des talents exilés, et des citoyens vivant dans la peur d’un simple clic sur une application.

Est-ce que posséder des crypto-monnaies est illégal en Tunisie ?

Oui. Posséder des crypto-monnaies n’est pas explicitement interdit par la loi, mais toute activité liée - échange, vente, transfert, mining - l’est. Si les autorités découvrent que vous détenez des actifs numériques, elles peuvent les saisir et vous poursuivre pour violation du code des changes. La simple possession peut être utilisée comme preuve d’intention d’activité illégale.

Puis-je utiliser Binance ou Kraken depuis la Tunisie ?

Techniquement, vous pouvez accéder à ces plateformes via un VPN, mais c’est illégal. Les banques tunisiennes surveillent les transferts vers ces sites. Si vous déposez ou retirez des fonds, votre compte peut être gelé. Les autorités ont déjà identifié des utilisateurs via des rapports bancaires. L’usage de ces plateformes n’est pas sécurisé et expose à des sanctions pénales.

Quels sont les risques si je mine du Bitcoin à la maison ?

Miner du Bitcoin en Tunisie est un crime. L’importation d’équipements ASIC est interdite et les douanes saisissent ces appareils à l’arrivée. Si vous êtes pris en train de miner, vous risquez la confiscation de votre matériel, une amende, et jusqu’à cinq ans de prison. Les autorités utilisent des algorithmes pour détecter les pics de consommation électrique anormaux - un indicateur courant de mining.

Les crypto-monnaies sont-elles taxées en Tunisie ?

Non. Les crypto-monnaies n’ont aucune reconnaissance légale en Tunisie, donc elles ne sont ni considérées comme une devise, ni comme un bien. Il n’existe aucun cadre fiscal pour les taxer. Mais cela ne vous protège pas : la simple possession ou utilisation peut être punie comme une violation du contrôle des changes, avec des sanctions pénales bien plus sévères que toute taxe.

Puis-je ouvrir une entreprise de trading de crypto en Tunisie ?

Non. Aucune licence n’est délivrée pour les plateformes de trading, les exchange ou les services de garde de crypto en Tunisie. Toute entreprise qui tente de le faire est considérée comme criminelle. Les banques refusent de leur ouvrir des comptes. Les fournisseurs de services web bloquent leur accès. Les autorités mènent des opérations de fermeture. Il n’y a pas de voie légale pour lancer ce type d’entreprise en Tunisie.

Qu’est-ce que le « sandbox » de la BCT ?

Le « sandbox » est un programme expérimental de la Banque Centrale de Tunisie qui permet à quelques startups de tester des technologies blockchain dans un cadre contrôlé. Mais il n’autorise pas les crypto-monnaies. Les projets doivent utiliser des chaînes privées, sans tokens publics, et ne peuvent pas traiter d’actifs numériques. C’est un outil de gestion publique, pas une porte de sortie pour les utilisateurs de crypto.

Pourquoi la Tunisie interdit-elle les crypto-monnaies ?

La Banque Centrale de Tunisie affirme que les crypto-monnaies menacent la stabilité financière, facilitent le blanchiment d’argent et échappent au contrôle de l’État. Elle craint aussi que les citoyens perdent confiance dans le dinar. Mais des experts soulignent que cette interdiction empêche l’innovation, pousse les jeunes à quitter le pays, et crée un marché noir plus dangereux qu’un cadre régulé.

Y a-t-il des signes que la loi va changer bientôt ?

Il n’y a pas de signe clair d’un assouplissement imminent. Des discussions parlementaires ont été ouvertes sur une possible classification des crypto comme « actifs virtuels », mais aucune loi n’a été proposée. La BCT maintient une ligne dure. Tant que le gouvernement considère les crypto comme une menace, et non comme une opportunité, la situation restera inchangée.

7 Commentaires

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    Andre Swanepoel

    décembre 2, 2025 AT 18:37

    C’est fou comment une loi aussi draconienne peut décourager une génération entière. Je connais des devs tunisiens qui ont déménagé à Lisbonne juste pour pouvoir coder en blockchain sans avoir peur de la police. Le pays perd plus qu’il ne protège.

    La vraie question, c’est pas « est-ce illégal ? » mais « pourquoi est-ce si dur de changer ? »

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    Mehdi Alba

    décembre 3, 2025 AT 10:09

    ALERTE CONSPIRATION 🚨

    La BCT ne veut pas que les gens utilisent les crypto… parce qu’ils savent que l’E-Dinar est une arnaque ! 🤫

    Le gouvernement a peur que tout le monde voie que le dinar vaut rien. C’est pour ça qu’ils interdisent Bitcoin - parce que c’est la vérité nue. 🧠💀

    Et oui, ils espionnent la consommation électrique. J’ai lu ça sur un forum de hackers russes. Ils ont un logiciel qui détecte les ASIC même si t’es dans ton sous-sol. 📡⚡

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    Djamila Mati

    décembre 4, 2025 AT 02:14

    En tant que tunisienne vivant en France, je vois les deux côtés. D’un côté, je comprends la peur du gouvernement : l’inflation, la fuite des capitaux, la corruption. De l’autre, je me demande pourquoi ils ne régulent pas plutôt qu’interdisent.

    Les jeunes veulent participer au monde numérique. Leur interdire, c’est comme leur dire : « Vous n’avez pas le droit d’être modernes. »

    Et ça, c’est une forme de violence culturelle.

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    Vianney Ramos Maldonado

    décembre 5, 2025 AT 00:40

    Il convient de souligner, avec une rigueur académique incontestable, que l’interdiction des actifs numériques en Tunisie s’inscrit dans un cadre légal strictement fondé sur le Code des changes, promulgué en 1972, et réinterprété par la Banque Centrale de Tunisie en vertu de son pouvoir discrétionnaire en matière de stabilité monétaire.

    Il est donc erroné de qualifier cette mesure de « répressive » ; elle constitue plutôt une application logique et constitutionnelle du principe de souveraineté monétaire.

    La notion de « liberté financière » n’existe pas dans les systèmes de droit civil traditionnel - et la Tunisie, en tant qu’État de droit, ne peut légalement reconnaître des monnaies non émises par l’autorité centrale.

    Le débat sur la « modernité » est donc un écran de fumée idéologique, dénué de fondement juridique.

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    Laurent Rouse

    décembre 5, 2025 AT 16:54

    Ben oui, bien sûr, les Tunisiens veulent des bitcoins… mais ils veulent surtout pas travailler. C’est ça le vrai problème.

    On a des gens qui passent leur journée sur Telegram à échanger des cryptos… mais qui refusent de faire un stage chez un vrai boulot.

    La France, elle, a eu des problèmes avec les crypto, mais on a mis des règles. Ici, on veut tout, sans effort. C’est pathétique.

    Et puis franchement, qui veut vraiment miner du BTC à 40°C dans un appart sans clim ? T’as vu les factures d’électricité ?

    Arrêtez de rêver, les gars. Le dinar, c’est votre réalité. Acceptez-la.

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    Philippe AURIENTIS

    décembre 7, 2025 AT 07:28

    Je suis d’accord avec ce que dit Djamila. La loi est trop dure, mais je comprends aussi pourquoi elle existe.

    Je travaille avec des startups tunisiennes, et la plupart d’entre elles ont dû déplacer leur siège à l’étranger. C’est triste.

    Je pense qu’il faut un compromis : autoriser les projets blockchain sans crypto, comme le sandbox, mais permettre aussi aux particuliers d’avoir des portefeuilles - avec un cadre clair. Pas de prison, juste des déclarations fiscales et des limites.

    La technologie est là. On peut pas la bloquer avec des lois du XXe siècle.

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    Denis Groffe

    décembre 7, 2025 AT 20:57

    La blockchain est une illusion technologique conçue pour désorienter les masses et détruire la notion de souveraineté étatique

    Les gouvernements savent que si les gens comprennent que l’argent n’est qu’un consensus, alors tout le système bancaire s’effondre

    Le dinar est une fiction. L’E-Dinar est une fiction plus grande

    Les gens qui minent sont des martyrs de la liberté numérique

    La police ne cherche pas des mineurs… elle cherche des esprits libres

    Et toi ? Tu as déjà regardé ton téléphone en te demandant si tu étais surveillé ?

    Je te le demande sincèrement. Tu as déjà senti la peur ?

    Si oui… tu es déjà dans le jeu

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